Que réserve l’année 2022 à l’Europe ? Si l’on en croit les turbulences et les incertitudes de ces derniers temps, il faut s’attendre à l’inattendu. Edouard Gaudot identifie certains des moments cruciaux qui nous attendent et qui pourraient déterminer l’orientation future de l’Europe pour longtemps.

Dans cette ouverture étroite qui sépare le passage à une nouvelle année occidentale décomptée en révolutions solaires à son équivalent oriental décomptée en révolutions lunaires, nous avons comme chaque année pris le temps de nous souhaiter, collectivement et individuellement le meilleur à venir. Ritualisés et mis en scène nos vœux résonnent cependant creux depuis deux ans qu’un virus intempestif est venu perturber en profondeur le cours de nos vies. A l’heure où il est devenu hasardeux de prévoir quoi que ce soit à plus de quelques semaines de distance, envisager l’année qui vient relève un peu de l’exercice de voyance…

Après un bref répit, ponctué par une séquence électorale favorable 2017-2019 qui semblait conforter les forces démocratiques centrales et contenir le potentiel dévastateur des populismes, l’Europe n’aura finalement émergé d’une décennie d’enchaînement critique des crises bancaires puis économiques, sociales et politiques, que pour replonger, avec le reste du monde, dans une profonde crise sanitaire. Dans ce contexte de bouleversements réguliers, où les faiblesses structurelles de nos sociétés sont mises à nu par le virus et ses effets disruptifs, la certitude qu’on peut avoir pour l’année 2022, c’est qu’elle sera marquée par l’incertitude. Et l’exigence d’une adaptation permanente.

Un monde plus incertain

La première de ces incertitudes est donc sanitaire. Celle d’une pandémie qui n’en finit pas de n’en plus finir. De vagues en vagues, l’épidémie mondiale de COVID19 continue de bouleverser l’ensemble de notre organisation collective et de mettre nos nerfs à l’épreuve. Si le réflexe initial de confinement des populations pour enrayer la circulation du virus a globalement cédé la place à des politiques vaccinales nationales, accompagnées d’un contrôle de plus en plus strict de la mobilité et des activités sociales, la sortie de ce tunnel reste à court terme douteuse. En outre, l’apparition régulière de variants, la diminution tendancielle de l’efficacité des vaccins, et le maintien d’obstacles légaux et politiques à leur diffusion au reste du monde jettent le doute sur la capacité des gouvernements à tirer les bonnes leçons de cette crise. Les conséquences de chaque regain potentiel du virus pèsent très lourd sur les prévisions des acteurs économiques, sur la viabilité des chaines de valeur mondialisées, sur les systèmes de santé, sur le moral des populations angoissées par les décès, les contrôles croissants et la menace de précarité, et sur la capacité des systèmes à tenir un cap dans un tel brouillard.

La deuxième incertitude est stratégique. On ne le voit pas toujours car c’est souvent l’affaire de diplomates et spécialistes, mais l’augmentation, souvent fort douloureuse pour les ménages et les entreprises, des prix des carburants ou de certaines matières premières comporte une dimension géopolitique très nette. Or en 2022, c’est dans un monde de plus en plus dangereux et instable que doit évoluer l’Europe. La nouvelle administration Biden est certes plus courtoise que la précédente, mais elle poursuit le mouvement de recentrage sur le Pacifique initié par Obama et celui sur ses propres intérêts, initié par Trump. D’une certaine manière, les faux-semblants d’une relation transatlantique compliquée soulignent les difficultés pour l’UE et ses membres à trouver leur place dans un environnement plus conflictuel que jamais, comme le soulignent la débâcle générale en Afghanistan et le fâcheux épisode de la rupture du contrat militaire franco-australien, au bénéfice d’une alliance AUKUS dont la tonalité rappelle la politique de containment de la guerre froide. La prise de conscience qu’il y a dans la Chine plutôt qu’un important partenaire commercial, un modèle concurrent, et un adversaire conquérant voire dangereux – de l’océan pacifique à l’Afrique – questionne en outre les équilibres européens, comme on le voit dans le débat public allemand ou la rupture exploratoire par la Lituanie du consensus diplomatique mondial autour de Taiwan. Ensuite, la radicalisation du régime Erdogan ou les actions hostiles du régime Lukashenko, qui détourne des avions de lignes ou use des migrants comme armes de déstabilisation massive font du voisinage de l’UE une zone à risques croissants. Mais en l’occurrence, de la pression gazière aux mouvements de troupes à la frontière ukrainienne, c’est surtout l’affirmation de la Russie comme un acteur révisionniste de l’ordre international qui est récurrente et dangereuse pour la cohésion et la sécurité européennes. Plus que jamais, les dynamiques à l’œuvre en 2022 forcent les Européens à repenser leur rapport à la puissance. L’âge de l’innocence est définitivement passé.

En avril prochain, Français et Hongrois se rendent aux urnes. Et les résultats de ces deux consultations pourraient bien faire basculer l’Europe dans une autre dimension.

Les effets de la pandémie et de la situation géopolitique se font sentir au quotidien. Entre inflation et prix croissants de l’énergie, clivages et polarisation politique, exaspérations et contraintes, le pouvoir d’achat et le moral des citoyens européens est volatile. Ce qui renforce d’autant les incertitudes politiques, troisième source d’inquiétudes. Au nom du terrorisme hier, de la santé aujourd’hui, le besoin de sécurité de nos sociétés, dont le seuil de tolérance au risque a tendanciellement baissé à mesure qu’augmentaient leur confort matériel et leur âge moyen, fait que l’exigence de sécurité prend presque systématiquement le pas sur la défense des libertés. Nationale et européenne, la liberté de circulation est à nouveau contrôlée et reconditionnée. Les restrictions civiles et politiques alimentent en outre les niveaux d’exaspération sociale, et des mouvements de colère font régulièrement surface, dans la rue ou dans les urnes. Enfin, la crispation culturelle et les polarisations identitaires mettent sous pression constante la cohésion nationale et sociale à travers l’Europe.

C’est dans ce contexte troublé que prendront place cette année deux élections cruciales pour l’avenir de la cohésion européenne. En avril prochain, Français et Hongrois se rendent aux urnes. Et les résultats de ces deux consultations pourraient bien faire basculer l’Europe dans une autre dimension. En France, où se profile dans moins de cent jours le premier tour de l’élection présidentielle, mère de toutes les batailles politiques nationales, la pandémie écrase tout le début de non-campagne électorale. Seul aux commandes d’un pays que la situation d’urgence, les institutions centralisées et l’affaiblissement des contre-pouvoirs rendent plus monarchique que jamais, le président français, qui en janvier n’avait toujours pas officialisé sa quête d’un nouveau mandat, gère la crise sanitaire sur une ligne de crête acrobatique. Entre discours martial, accompagnement économique généreux et violente stigmatisation des « irresponsables » non-vaccinés, dont il est allé sans vergogne jusqu’à remettre en question la citoyenneté, il sait qu’il joue sa réélection sur cet équilibre délicat.

Le besoin de sécurité de nos sociétés, dont le seuil de tolérance au risque a tendanciellement baissé à mesure qu’augmentaient leur confort matériel et leur âge moyen, fait que l’exigence de sécurité prend presque systématiquement le pas sur la défense des libertés.

Le grand pari de Macron

Dépourvu de challenger sérieux pour le moment, Macron domine les sondages tout en plafonnant à un petit quart des intentions de vote, et sans perspective réelle de progrès. Doublement risqué, son pari d’une polarisation à outrance entre le centre, progressiste, rationnel, citoyen, européen et responsable, en rupture profonde avec toutes les formes d’extrémismes et de radicalité lui assure à la fois légitimité et cohésion chez ses supporters. Mais, sans réserves au-delà, il en est réduit à espérer que le repoussoir des épouvantails radicaux suffira à lui garantir la victoire contre tout adversaire émergeant de ce concours d’oppositions.

Ce qui n’est pas certain. Le premier risque est bien sûr dans la radicalisation de ses adversaires. Certes c’est une dynamique qui sert son récit de nouveau héraut de l’Ordre et du Progrès. Mais s’il venait soudain à dévisser, sa défaite ouvrirait les voies du pouvoir aux nostalgiques des ordres noirs. Ainsi, l’irruption dans la course électorale de la candidature d’un polémiste d’extrême-droite en campagne exclusive et agressive sur le déclin de la France, la préservation de l’identité nationale et le rejet violent des vagues migratoires futures et passées, a eu deux conséquences majeures. La première est d’avoir rendu ces thématiques plus centrales que jamais, forçant ainsi les autres concurrents à jouer sur ce terrain toxique – ce qui affaiblit encore plus les candidatures de la gauche et des écologistes. A droite, la radicalisation de la candidate LR, Valérie Pécresse, en illustre aussi fort bien les effets délétères. Mais si d’aventure celle-ci parvenait à agréger son socle modeste de droite conservatrice modérée restée fidèle au parti, aux franges purement réactionnaires ranimées par les discours d’Eric Zemmour, elle pourrait bénéficier du deuxième effet de la candidature de ce-dernier sur le champ électoral. En effet, avec le succès, au moins sondagier, de cette nouvelle candidature au sein de la droite radicale, le seuil du ticket d’entrée pour le deuxième tour de l’élection a considérablement baissé pour venir se situer autour de 14-17 pourcent, scores autour desquels gravitent aussi bien l’ancienne finaliste Marine Le Pen, que les deux autres concurrents. L’incertitude est donc réelle.

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C’est le grand risque de ce pari d’Emmanuel Macron. L’hystérisation et la polarisation du débat par ce président excessif et clivant rendent toute victoire éventuelle d’une alternative aussi dangereuse que possible par la mobilisation asymétrique qu’elle peut susciter. Dangereuse pour des libertés publiques pourtant déjà sérieusement malmenées sous son mandat, pour les politiques environnementales et la transition écologique timidement engagées pendant un quinquennat très ambivalent sur ces sujets, enfin pour les équilibres de la société française, les inégalités croissantes et les droits sociaux, que sa pratique du « en-même-temps » aura surtout contribué à affaiblir, entre fiscalité bénéficiant aux plus riches et précarisation accrue des chômeurs.

Le deuxième risque pèse sur le rôle de la France dans le monde en général et en Europe en particulier. Illustrée jusqu’à la caricature par le débat suivant son discours au Parlement européen où les intervenants français ont sombré dans la surenchère nationale, la position centrale du président s’accompagne en outre d’un quasi-monopole de l’engagement européen. Premier candidat à avoir sérieusement articulé son ambition nationale à la dimension européenne, et gagné, Emmanuel Macron est un embarras pour les forces politiques comme les écologistes qui défendent l’intégration européenne et se réclament d’une forme de fédéralisme continental. Profitant opportunément que la Présidence tournante du Conseil de l’UE échoie à la France pour le premier semestre 2022, le président français accapare la parole européenne, comme il le fit à Strasbourg le 19 janvier, aspirant l’espace politique naturel des écologistes incapables de trouver le ton juste et l’angle pertinent pour lui disputer ce drapeau étoilé dont il ne fait pourtant pas toujours un usage honnêtement européen.

Là les incertitudes le cèdent à l’ambivalence. Car la victoire du président sortant signerait évidemment la continuation d’une politique dangereuse pour la cohésion sociale française, dont la crise nourrit chaque jour un peu plus les mouvements de colère et de désespérance du pays. Mais elle offrirait sans nul doute une impulsion décisive à la dynamique réformatrice qui s’est enfin ouverte dans le sillage de la relance européenne et du remplacement à Berlin de la prudente Angela Merkel par une coalition qui affiche son ancrage et ses ambitions européennes. En revanche une défaite aux mains de concurrents radicalisés dans leur hostilité à l’intégration européenne, aux institutions communautaires et, souvent, au partenaire allemand casserait net le ressort européen. Faut-il se résoudre à soutenir Emmanuel Macron au nom de la progression de la construction européenne, malgré tout ? C’est un des choix cornéliens que feront certains, qui cimente déjà une partie de son électorat bourgeois progressiste où se marient centre-droit et centre-gauche.

Un champ de candidats très dense à gauche

Car c’est peut-être la seule certitude de cette situation si déprimante pour la partie gauche du spectre électoral : la probabilité que la défaite de Macron provienne des rangs de celle-ci est nulle – et vaguement limitée pour le moment au candidat le plus ambivalent sur ces sujets et le moins favorable à l’Europe : Jean-Luc Mélenchon, dont c’est, là aussi certitude, la dernière course présidentielle avant la retraite. Parvenu au terme d’une évolution politique et personnelle à embrasser de façon originale, populaire et convaincante les enjeux de l’écologie politique, le candidat de la gauche radicale peut encore espérer que le vote utile fasse oublier son inquiétante indulgence pour les régimes autoritaires chinois ou russe dans les affaires internationales. Mais sa capacité à rééditer l’envolée de 2017 paraît d’autant plus douteuse que son quinquennat d’opposition a plus affaibli que renforcé sa stature présidentielle et la vitalité de son mouvement. Les autres sont pour l’instant des concurrents boiteux.

Autrement dit, sur cette partie de l’échiquier, le champ de ruine est complet. Cantonnées à un périmètre comparable, quoique plus modeste, aux autres blocs (environ 25 pourcent), pas moins de six candidatures se disputent le douteux privilège d’arriver en tête des perdants. Confirmant l’adage que la faiblesse engendre la division, le fantôme du Parti Socialiste s’étiole, tiraillé entre un ancien ministre plutôt souverainiste, passéiste et productiviste, qui a fini par jeter l’éponge, une candidate officielle de plus en plus faible, hors-sol et discréditée, et la candidature intempestive, hors-parti et programmatiquement superficielle d’une star de l’ancien gouvernement Hollande : l’ancienne ministre de la Justice, icône du mariage gay, du verbe haut et des illusions d’union de la gauche – nourries entre autres par une initiative de primaire, dite « populaire » avec son demi-million d’inscrits, mais probablement trop tardive pour être légitime ou efficace. A cela il faut ajouter l’inévitable et traditionnelle paire de candidatures d’inspiration trotskiste et le retour du Parti Communiste. Enfin, malgré sa résilience courageuse mais un peu désespérée, le candidat écologiste Yannick Jadot voit son espace politique se réduire jusqu’à l’asphyxie, aussi bien à cause des thèmes dominant du débat que de cette multiplication des sauveurs de la gauche, dont le principal effet est de lasser le public et discréditer tous ceux qui occupent le champ. Irréconciliables sur des querelles d’appareils et des affrontements de personnalités, bien plus que sur des fractures éventuelles ou des nuances idéologiques souvent surjouées pour des raisons de stratégie électorale, ces candidatures multiples ont échoué avec constance à produire des figures de rassemblement, dans un jeu à somme aussi nulle que leur capacité à produire le récit agrégatif qui leur fait défaut.

Pas moins de six candidatures se disputent le douteux privilège d’arriver en tête des perdants.

S’attaquer aux stratégies alarmistes d’Orbán

L’unité, c’est pourtant la leçon, pénible et douloureuse, que l’opposition hongroise a fini par apprendre, comprendre et mettre en pratique pour tenter de renverser Viktor Orban. Au pouvoir depuis 2010, et bénéficiant de confortables majorités constitutionnelles, le premier ministre hongrois a depuis, non seulement pu réorganiser l’ensemble des règles électorales et politiques nationales à son profit, mais aussi se construire un formidable récit de rempart contre les ingérences étrangères, où Bruxelles est un nouveau Moscou, les migrants de nouveaux Mongols, et la Hongrie une victime éternelle des trahisons par les grandes puissances européennes.

Vétéran des gouvernements de l’UE depuis le départ d’Angela Merkel, le premier ministre hongrois brigue cette année un quatrième mandat consécutif. Comme un double négatif du président français, Orban a lui aussi marié positionnement domestique et stature européenne. A la faveur la crise humanitaire de 2015, il est devenu la figure emblématique de la droite radicale européenne. Alors que la gare de Keleti au centre de Budapest se transforme en vaste camp pour réfugiés syriens en exode, l’homme fort de l’Europe centrale fait dresser des barbelés aux frontières extérieures de la Hongrie, justifie les violences policières à leur encontre et organise un référendum tronqué pour montrer à l’Europe que les Hongrois ne veulent pas de migrants, avec ou sans quotas de la Commission européenne. Enfin, surtout, il convoque dans ses discours à destination du public européen en général, et de sa famille politique, la démocratie-chrétienne, en particulier l’imaginaire de la chute de Rome pour dramatiser la pression migratoire en la rebaptisant Völkerwanderung – « migrations des peuples ».

Son discours des « vrais européens » défenseurs de la civilisation blanche et chrétienne contre les hordes barbares n’est que le voile classique à peine transparent jeté sur un fantasme moderne raciste, cultivé par la sphère intellectuelle réactionnaire et ses relais conspiratonnistes : le « grand remplacement », soit la substitution progressive de la population européenne de souche blanche et de culture chrétienne, par des peuples d’Afrique et du Moyen-Orient, déguisant leurs sombres desseins colonisateurs sous le visage émouvant des réfugiés ou les hardes pathétiques des migrants de la misère. Mais les propos d’Orban connaissent ensuite un succès remarquable dans toutes les officines on- et offline où se distillent les vapeurs frelatées de la panique identitaire, entre déclin de la natalité et de l’économie, dynamiques de l’Islam, migrations, terrorisme, décadence morale de l’occident, etc., le tout organisé bien entendu par les élites libérales et cosmopolites du capitalisme financier mondialisé.

Malgré l’échec, provisoire, de la constitution d’un groupe commun aux élus de droite radicale et extrême au parlement européen suite à son départ du PPE, Orban trône, bien plus que le vice-premier ministre polonais Jaroslaw Kaczynski, au cœur de la recomposition idéologique européenne. Il en est un pivot culturel et un animateur régulier, une référence cardinale pour s’orienter dans le nouveau clivage entre « mondialistes » et « patriotes » qu’il tente d’imposer avec ses alliés. Ce donc n’est pas un hasard si l’on a pu ainsi voir se presser successivement deux candidats à la présidentielle française venus chercher à Budapest l’onction du nouveau pape de la droite radicale européenne.

En Hongrie, les leçons de 2014 et 2018 ont été retenues. Jamais l’opposition n’a été aussi organisée, responsable et solidaire.

Comme pour l’Allemagne à l’automne dernier, comme pour la France au printemps prochain, plus encore même que pour la Pologne l’année prochaine, l’enjeu des élections législatives hongroises de cette année dépasse de très loin l’échelle nationale. Ce pour quoi se bat l’opposition, enfin unie par-delà ses profondes différences, c’est d’abord les libertés de tous les citoyens hongrois. Leurs droits en tant qu’individus, le pluralisme de leurs médias, la vitalité de leur société civile, l’existence même de leur démocratie. C’est aussi une bataille pour leurs libertés économiques, leurs conditions de travail et de vie, l’égalité entre eux, un combat contre l’accaparement des richesses et la corruption d’une mini-oligarchie organisée par le premier ministre sur le modèle moscovite. Mais à travers et au-delà de tout cela, il y a l’enjeu de faire chuter le symbole du mal qui, depuis plus d’une décennie maintenant, ronge le socle de l’Etat de droit et des valeurs qui fondent l’UE.

La pente est rude. Mais les leçons de 2014 et 2018 ont été retenues. Jamais l’opposition n’a été aussi organisée, responsable et solidaire. Comme l’indiquent les dynamiques des sondages, pour la première fois le jeu est suffisamment ouvert pour projeter une incertitude sur la réélection d’Orban. Après le retour de Brastislava puis Prague dans le sein des valeurs communautaires, un tel basculement changerait considérablement la donne européenne. En revanche, si la droite orbanienne l’emportait à nouveau à Budapest et surtout, si elle prenait Paris, les incertitudes de 2022 prendraient soudain un tour bien plus sombre encore. Il est encore temps de formuler nos vœux pour l’année qui commence. Souhaitons-nous un retour de la lumière face à l’ombre qui gagne.

Derrière le quitte ou double de Macron et Orban, c’est notre destin européen qui se joue.