Translations

EN FR IT

Les chances sont faibles que la pénurie d’énergie qui sévit aujourd’hui dans l’UE soit temporaire et ce sont surtout les pauvres d’Europe qui en font les frais. Les gouvernements des États membres, quels que soient leurs efforts, ne pourront pas résoudre ce problème en s’appuyant sur de nouveaux combustibles fossiles, l’énergie nucléaire et la remise en service des centrales au charbon. Ils devront trouver les moyens de faire en sorte que les sociétés européennes utilisent moins d’énergie. Swen Ore examine le concept de « sobriété énergétique » et explore le rationnement ainsi que la tarification progressive de l’énergie en tant que moyens socialement justes de gérer la descente énergétique.

Avec l’interruption de l’approvisionnement de l’Europe en gaz russe et la menace d’une crise énergétique, le rationnement opère un retour – bien que de façon déguisée. Afin d’éviter tout choc frontal avec les fondements idéologiques de notre société d’abondance, les expressions que nous entendrons à ce sujet seront plutôt la « réduction de la consommation », la « gestion de la demande », la « simplicité volontaire » ou encore la « sobriété énergétique ».

Mais qu’est-ce que la sobriété énergétique ? Et même si le sujet demeure quelque peu tabou, les principes du rationnement n’offriraient-ils pas une alternative à la situation actuelle, à savoir une pauvreté énergétique en hausse dans un contexte de crises écologiques ?

Pour les écologistes, la « sobriété » est un terme porteur d’une résonance très particulière. Aux yeux du philosophe Ivan Illich, un penseur radical dont les écrits ont inspiré le mouvement naissant de l’écologie politique, la sobriété exprime une conception antiproductiviste de la société fondée sur une éthique de la « convivialité », qui encourage les gens à entretenir des relations autonomes et créatives entre eux et avec leur environnement. Comme il l’écrit en 1973 dans La Convivialité, « Les gens ne redécouvriront la valeur de la sobriété joyeuse et de l’austérité libératrice que s’ils réapprennent à dépendre les uns des autres plutôt que des esclaves énergétiques» [1].

La sobriété, lorsqu’elle concerne l’énergie, reflète une vision politique à long terme pour une société qui se donne les moyens d’échapper au cycle des crises répétées en atténuant sa dépendance à l’énergie. Il ne s’agit pas uniquement de dire que « nous » devrions consommer moins, comme si les inégalités sociales n’existaient pas. Au contraire, la sobriété met au défi de concrétiser un changement structurel de l’utilisation de l’énergie qui soit à la fois démocratique et socialement juste.

Sobriété ou simplicité volontaire ?

A première vue, le recours au terme « sobriété » peut prêter à confusion avec la lutte contre l’alcoolisme. Le chercheur français Luc Semal, l’un des auteurs de l’ouvrage de référence Sobriété énergétique, en a fait l’expérience lors de ses premières rencontres avec des organisations de terrain. Mais une fois le malentendu dissipé, la métaphore demeure. Comme dans le cas de l’alcool, nous souffrons d’une soif civilisationnelle d’énergie. Les deux denrées doivent être produites correctement, choisies adéquatement et consommées avec modération. L’abus d’énergie, comme l’abus d’alcool, peut se révéler destructeur, tant pour l’environnement physique que pour les structures sociales.

Dans le monde anglophone, lorsqu’il se rapporte à l’énergie, le terme sufficiency est plus souvent utilisé que sobriety. Dans le cadre de cet article, nous considérerons les deux comme équivalents. Les deux concepts reconnaissent la nécessité de dire qu’ « assez est assez » et de créer une alternative à l’utilisation insatiable – voire au gaspillage – de l’énergie par nos sociétés.

Priced Out: The Cost of Living in A Disrupted World
This article is from the paper edition
Priced Out: The Cost of Living in A Disrupted World
Order your copy

La production et la consommation d’énergie en France – y compris l’énergie grise contenu dans les importations – n’ont cessé de croître depuis 1945. Divers modes de gestion de l’énergie ont été tentés depuis les années 1990 – et même plus tôt si l’on considère les campagnes contre le gaspillage des années 1970. Mais ces politiques ont, soit porté sur l’efficacité énergétique, soit relevé de la posture politique.

Il en va de même des politiques énergétiques de l’Union européenne. En 2012, la chercheuse Maria Edvardsson n’est pas parvenue à trouver un texte de la Commission européenne traitant directement des concepts de sobriété énergétique [2]. Et il semble que peu de choses ont changé depuis lors. Quand l’expression apparaît, son usage reflète une confusion avec la notion d’efficacité énergétique.

Le discours dominant en matière d’économies d’énergie reste profondément ancré dans le paradigme de la croissance, dominé par les innovations techniques. Ce paradigme se trouve exprimé de la façon la plus limpide dans les travaux influents que le théoricien social états-uniens Jeremy Rifkin a consacré à la « troisième révolution industrielle ». Dans sa vision, la technologie Internet et les énergies renouvelables permettront à des centaines de millions de personnes de produire leur propre énergie verte. Ces infrastructures décentralisées se substitueront à nos systèmes vieillissants basés sur le nucléaire, le gaz et le charbon. Ce nouveau monde de technologies hautement interconnectées créera des millions d’emplois et « d’innombrables nouveaux biens et services », perpétuant ainsi la croissance économique.

Dans ce contexte, les économies d’énergie sont considérées comme une possibilité offerte par les innovations techniques de réduire les coûts de production et d’accélérer la production de nouvelles technologies afin de basculer vers une économie décarbonée. L’efficacité énergétique repousse les limites de la croissance, ce qui conduit finalement à une consommation accrue d’énergie au niveau mondial. C’est ce raisonnement qui a conduit le président français Emmanuel Macron à déclarer en février 2022 que, pour réduire la consommation énergétique de la France de 40 %, le pays devait « croître dans la sobriété ». Il a déclaré que cet objectif pouvait être atteint “sans privations” grâce à “l’innovation [et la] transformation de nos processus industriels ».

Pour les écologistes comme Luc Semal, ce dessein ne correspond pas à l’émergence de la société dont ils rêvaient. La sobriété énergétique à laquelle ils aspirent est politique. Elle porte sur la répartition équitable des efforts de réduction de la consommation d’énergie et non sur le développement d’innovations technologiques. Pour eux, la simplicité volontaire consiste à repenser la demande énergétique mondiale. Pour ce faire, il faut aussi repenser les fondements économiques de nos démocraties.

Le « contrat naturel », amendement au contrat social

Dans les démocraties capitalistes, l’accès à l’énergie est considéré, soit comme un droit accordé aux plus pauvres, soit comme une liberté pour les plus riches. À ce titre, les efforts d’écologisation de ces démocraties – qui impliquent des politiques de réduction de la consommation énergétique globale –suscitent chez les premiers la peur de l’insécurité et, chez les seconds, le sentiment que leur liberté et leur mode de vie sont menacés. La sobriété énergétique nécessite donc la redéfinition d’un contrat social dans lequel les limites des ressources sont enfin prises en compte pour définir collectivement ce que signifie réellement « assez ». C’est ce que le philosophe Michel Serres appelle le « contrat naturel ».

L’objectif est à cet égard de réduire les inégalités en créant de nouveaux mécanismes de solidarité fondés sur la rareté des ressources plutôt que sur leur abondance. Le concept de simplicité volontaire est un défi qui peut rendre les discussions sur l’énergie plus tangibles et exige de repenser l’égalité et la justice à travers le prisme de la consommation énergétique.

L’objectif d’une telle politique est d’anticiper – de manière démocratique –  ce que l’économiste Christian Arnsperger et le philosophe Dominique Bourg appellent « le retour contraint à la simplicité volontaire, sous des formes inéquitables et violentes, destructrices de la dignité humaine  authentique ». C’est-à-dire la montée en puissance de la pauvreté énergétique dans le contexte de la crise actuelle.

La sobriété énergétique reflète une vision politique à long terme pour une société qui se donne les moyens de sortir du cycle des crises à répétition.

Rationnement et simplicité volontaire collective

L’histoire européenne regorge d’exemples de politiques de rationnement menées pendant les guerres ou les crises pétrolières. Mathilde Szuba [3], résumée et paraphrasée ici par l’auteur, décrit les politiques de rationnement en France pendant les deux guerres mondiales, ainsi qu’aux Pays-Bas pendant la crise pétrolière de 1973. Quand la situation l’impose, les gouvernements sont tout à fait capables d’intervenir drastiquement et équitablement sur le marché. Mais ces politiques ne sont acceptées par les populations que dans la mesure où elles peuvent offrir à la fois l’équité aux plus pauvres et la sécurité aux plus riches.

En France, le rationnement reste associé à l’occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale, où il a été utilisé comme instrument de privation. Cela étant, l’expérience française du rationnement menée vingt-cinq ans plus tôt, pendant la Première Guerre mondiale, montre qu’il peut aussi être utilisé pour lutter contre l’injustice sociale et la surconsommation. [4]

En 1915, la guerre fait grimper l’inflation des produits alimentaires et du charbon. Dans un premier temps, l’intervention du gouvernement pour lutter contre ce phénomène consiste à obliger les détaillants à afficher les prix moyens des denrées alimentaires dans les vitrines à côté des leurs. Rien n’y fait, les prix continuent à grimper en flèche, exacerbant les tensions. Le gouvernement décide en 1916 de fixer des prix maximum, d’abord sur le sucre et le charbon, puis sur d’autres produits de base. Mais ces mesures ne parviennent pas à enrayer la montée des inégalités.

En 1917, les Parisiens demandent au gouvernement d’aller plus loin en rationnant le charbon. Malgré la résistance initiale de la majorité parlementaire, décision est prise de limiter les achats des classes supérieures, assurant ainsi un accès pour tous. La population, qui ne peut plus se permettre d’acheter une ressource devenue rare et trop chère, réserve bon accueil à cette décision politique. Le fait que la fixation des prix et des quantités par le gouvernement n’a lieu qu’en dernier recours et sous la pression populaire mérite d’être souligné.

La mise en œuvre du rationnement du charbon a nécessité une importante réorganisation administrative. Le ministère de l’Armement décidait de la répartition nationale du charbon par l’intermédiaire de l’Office national du charbon, qui organisait ensuite la distribution au niveau départemental. Le principe clé de cette politique était « un feu par ménage », ce qui désavantageait bien sûr les riches. L’allocation charbon pouvait être légèrement augmentée pour les familles plus nombreuses, ce qui tendait en général à profiter aux classes ouvrières.

Les dissensions politiques au parlement et au sénat sur l’introduction du rationnement du charbon ont opposé les intérêts des producteurs et des propriétaires (plus ruraux) à ceux des consommateurs et des travailleurs (plus urbains). En fin de compte, cette intervention publique sur le marché et dans la sphère privée a permis d’apaiser les tensions sociales et de préserver la cohésion sociale jusqu’à la fin de la guerre.

Le rationnement a aussi caractérisé les crises pétrolières des années 1970. Quand éclate la guerre du Kippour en 1973, l’OPEP impose un embargo pétrolier aux pays qui soutiennent Israël, dont les Pays-Bas. Le prix du pétrole quadruple, contraignant les autorités néerlandaises à agir sans délai. À partir de novembre 1973, les voitures privées ne peuvent plus circuler le dimanche. En janvier 1974, cette restriction est remplacée par un rationnement du pétrole via un système de coupons. L’objectif de cette mesure, soutenue par les compagnies pétrolières et le gouvernement den Uyl, est de ramener la demande au niveau des importations, soit une baisse de 30 %. Mais au bout d’un mois, les importations reprennent et le rationnement est supprimé. Le gouvernement poursuivra son programme de réduction de la consommation d’énergie en limitant la vitesse sur les routes.

Si nous revenons au contexte actuel, il est raisonnable de penser que le rationnement de l’énergie permettrait d’anticiper la déplétion pétrolière, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de limiter les activités humaines à l’origine de la perte de biodiversité. Mais dans quelle mesure serait-il possible d’introduire le rationnement énergétique en dehors de graves situations de guerre et de crise ? Les exemples historiques présentés ci-dessus diffèrent de notre contexte actuel sur deux points au moins. Premièrement, la crise écologique n’est pas temporaire. L’objectif de la mise en œuvre d’une politique de simplicité volontaire serait d’établir une « nouvelle normalité ». Deuxièmement, la dépendance énergétique est plus marquée qu’elle ne l’a jamais été. Le pétrole en particulier semble impossible à remplacer dans le secteur des transports sans initier de profonds changements dans les infrastructures et les services de mobilité.

De la crise énergétique à la « nouvelle normalité »

Pour en revenir au présent, les perturbations de l’approvisionnement de l’Europe en gaz russe ont provoqué une hausse spectaculaire des prix. Ces envolées des prix ont surtout touché les personnes les plus vulnérables et contraint les gouvernements de l’UE à prendre une série de mesures d’urgence qui ont fait couler beaucoup d’encre : plafonnements des prix de l’énergie, réductions des taux de TVA, impôts sur les superprofits, impôts sur les bénéfices exceptionnels pour les entreprises du secteur de l’énergie, tarifs sociaux subventionnés élargis aux ménages à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et « chèques énergie » pour les ménages et les entreprises.

Le dénominateur commun de ces mesures est qu’elles se concentrent uniquement sur les prix ; quantités et utilisations n’entrent jamais dans l’équation. Aucune distinction n’est faite entre le chauffage de l’eau pour une douche et pour une piscine privée, ou entre un kilomètre parcouru pour aller travailler et un kilomètre parcouru pour faire du tourisme. Là réside pourtant le nœud du problème. Comment justifier le subventionnement de kilowattheures dont l’utilisation est inutile, voire extravagante ? Comment accepter de payer collectivement certaines pratiques incompatibles avec nos engagements écologiques ?

Comme l’alcool, l’abus d’énergie peut être destructeur pour les environnements physiques et les structures sociales.

La tarification progressive de l’énergie, qui aide à faire la distinction entre les usages, offre une solution à ce problème. Dans un tel système, les premiers kilowattheures consommés sont bon marché et les prix augmentent ensuite par paliers. Le tarif progressif garantit la satisfaction des besoins essentiels, tandis que les gros consommateurs paient un supplément. Une formule bien connue du politologue et journaliste Paul Ariès résume cette approche : « gratuité de l’usage, renchérissement du mésusage ».

Ce n’est un mystère pour personne : la consommation d’énergie (et donc les émissions de CO2 et autres impacts environnementaux) augmente avec le revenu ; un tarif progressif est donc aussi un tarif social. Ce principe peut aussi s’appliquer aux entreprises et aux industries en fonction de leurs impacts écologiques, sociaux et économiques, afin de maintenir et d’accroître notre pouvoir collectif de vivre dignement.

Lors de ses entretiens avec des personnes subissant malgré elles la simplicité énergétique volontaire au quotidien, Luc Semal a constaté que l’explication du concept les amenait parfois à renverser la stigmatisation sociale autour de cette question : « La surconsommation est l’apanage des riches tandis que la suffisance peut être la vertu des plus pauvres ». Émerge alors une conception plus politique des inégalités écologiques, qui va de pair avec une critique des inégalités économiques.

Une manière plus radicale encore de répartir équitablement l’énergie serait de recourir à des quotas personnels. Le système des quotas domestiques échangeables a été proposé pour la première fois par l’analyste politique David Fleming en 1996. Selon cette proposition, un budget carbone est fixé au niveau national. Celui-ci est ensuite divisé en droits d’émission individuels. Chaque membre d’une société donnée recevrait les droits d’émission nécessaires pour acheter du carburant ou de l’électricité (en plus du paiement financier normal). La vente et l’achat de droits seraient autorisés, mais aucun droit d’émission supplémentaire ne pourrait être émis, ce qui produirait un effet redistributif.

De nombreuses variantes de cette idée ont été développées, notamment l’échange de carbone personnel, les quotas de carbone personnels et l’échange de droits d’émission pour l’utilisateur final. Des propositions en ce sens ont même suscité un intérêt considérable de la part du gouvernement britannique au début des années 2000. Mais dans le sillage tumultueux de la crise financière de 2008, le gouvernement britannique a déclaré que « cette idée était pour l’heure en avance sur son temps » et l’a mise au placard.

La pente glissante de la descente énergétique

Il semble, et c’est un paradoxe, que plus une société consomme de l’énergie, moins les gens ont conscience de sa matérialité. Si l’abondance relègue la gestion de l’énergie dans la sphère privée et, compte tenu de la simplicité volontaire, dans la sphère morale et philosophique, sa rareté la ramène dans le champ politique. Dans un jeu à somme nulle, la consommation d’une personne peut se faire au détriment de celle d’une autre. Cette interdépendance est la première étape de la politisation.

Mais un contrat social ne suffira pas. Le principe de la diminution progressive des quantités globales exige une sorte de « contrat naturel ». La nature n’étant malheureusement pas capable de parler d’elle-même, des limites devront être fixées plutôt qu’imposées de l’extérieur. Or, c’est l’objet même des institutions politiques que d’organiser et de gérer la répartition, d’arbitrer les besoins et de hiérarchiser les usages.

Les restrictions de déplacements drastiques imposées pendant la crise de la Covid-19 ont montré que la mise en œuvre rapide de politiques est possible, mais aussi que de telles mesures soulignent des inégalités qui peuvent mettre en péril leur acceptation. Les politiques de rationnement ne peuvent être efficaces à long terme que si elles reconnaissent les expériences des groupes pour lesquels la rareté est une réalité quotidienne. L’incapacité à mettre en place des mécanismes équitables et solidaires pour organiser le rationnement de l’énergie (tels qu’une tarification progressive de l’énergie) pourrait conduire à des conflits sociaux de grande ampleur en raison de pénuries.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, la guerre en Ukraine entraîne une crise énergétique majeure. Alors que les États adoptent des mesures de soutien aux personnes à faibles revenus, il est clair que ce n’est pas seulement une question de prix, mais aussi d’usage et d’approvisionnement, ce qui pousse les décideurs politiques dans la direction du rationnement. En France, le terme « sobriété » n’est plus un gros mot. Le président Emmanuel Macron a lui-même promis en juillet 2022 un « plan de sobriété énergétique » pour se passer du gaz russe.

Une fois encore, des politiques de simplicité volontaire sont mises en œuvre en réaction à une crise. Dans Sobriété énergétique, les auteurs s’interrogent sur la capacité réelle de nos démocraties à s’engager proactivement dans la voie de la sobriété énergétique pour faire émerger une société véritablement écologique. Ce qui est indéniable, en revanche, c’est que l’énergie est un sujet de débat démocratique. Les préoccupations actuelles sur les prix de l’énergie ne doivent pas occulter la double crise qui se profile devant nous : la fragilité de notre approvisionnement énergétique et la nécessité d’organiser une révolution énergétique à grande échelle, qui impliquera nécessairement la simplicité volontaire. L’utilisation de l’énergie, en tant que ressource limitée, doit contribuer au bien commun mondial. La construction d’un système de distribution de l’énergie qui distingue les usages est le meilleur moyen de faire face à la fois à la hausse des prix de l’énergie et à la surconsommation. Comme l’écrit la sociologue de l’environnement Mathilde Szuba : « Impensable ? Irréalisable ? Pas vraiment et, en fait, nous l’avons déjà fait auparavant ».

Merci à Peter Sims, Sien Hasker, Jonathan Essex, Luc Semal, Mathilde Szuba pour leurs commentaires et critiques.

Traduit de l’anglais par André Verkaeren.


[1] L’expression « esclave énergétique » renvoie à la quantité d’énergie nécessaire pour remplacer la travail humain. Ivan Illich (1973), Tools for Conviviality, New York: Harper & Row.

[2] Maria Edvardsson (2012), La Sobriété énergétique dans la politique de l’énergie de l’Union européenne. L’inexistence au niveau européen d’un concept important dans l’atteinte des objectifs énergétiques et climatiques, Rapport d’expertise de M1, IEP de Lille.

[3] Mathilde Szuba, in Bruno Villalba and Luc Semal (eds) (2018). Sobriété énergétique: contraintes matérielles, équité sociale et perspectives institutionnelles. Versailles: Editions Quae.

[4] Thierry Bonzon (1996), « La société, l’État et le pouvoir local : l’approvisionnement à Paris, 1914-1918 », Guerres mondiales et conflits contemporains, 183 : 11-28.

[5] Thierry Bonzon (2006), « Consumption and total warfare in Paris (1914-1918) », in Frank Trentmann and Flemming Just (eds), Food and Conflict in Europe in the Age of the Two World Wars. London: Palgrave Macmillan

Priced Out: The Cost of Living in A Disrupted World
Priced Out: The Cost of Living in A Disrupted World

This edition asks what the social and political impacts of the cost of living crisis are, and what alternatives remain for meeting our needs.

Order your copy